Le volontariat des pompiers critiqué… mais pas dans les médias
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Le volontariat des pompiers critiqué… mais pas dans les médias

Les syndicats de pompiers dénoncent les dérives du modèle français, ils sont inaudibles

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Les syndicats de sapeurs-pompiers le disent : la sécurité civile française est à bout de souffle. Elle repose en effet entièrement sur l’utilisation d’une main d’œuvre low cost, dont 78 % des effectifs sont composés de volontaires. Le sujet ne suscite pourtant aucun intérêt médiatique. Second volet de notre enquête sur les faillites journalistiques concernant les pompiers.

Saviez-vous que des procédures pour faire reconnaître le statut de travailleur des pompiers volontaires sont en cours, en appui sur le droit européen, et qu'elles font trembler les pouvoirs publics ? Les syndicats de sapeurs-pompiers ont bien essayé de faire savoir les actualités autour de ce combat social et juridique sensible, qui remet en cause l'ensemble du système de sécurité civile français. Mais aucun communiqué syndical n'attire l'attention des journalistes. Pour comprendre, Arrêt sur images a contacté sept organisations syndicales représentatives de ce corps. Non contents de se désintéresser de la santé des pompiers, comme nous l'exposions dans le premier volet de cette enquête, les médias taisent aussi le débat autour de la condition sociale des sapeurs-pompiers, déplorent leurs représentants syndicaux unanimes.

Dans les grandes villes, dans un même camion rouge, envoyés sur les mêmes missions, pour effectuer les mêmes gestes, selon le droit français, certains pompiers travaillent (les pompiers professionnels), d'autres pas (les pompiers volontaires). "Le sujet des sapeurs-pompiers volontaires, c'est un sujet délicat, délibérément caché par les politiques. C'est du travail au noir, devant lequel tout le monde ferme les yeux", résume Sébastien Bouvier, secrétaire général CFDT des Services départementaux d'incendie et de secours (Sdis). Des mots percutants, limpides, que l'on retrouve chez l'ensemble des syndicats de pompiers professionnels, mais qui ne font pourtant l'objet d'aucun débat public.

Professionnels et volontaires : deux statuts, des missions identiques

Sur les 252 000 pompiers français, 78 % sont des sapeurs-pompiers volontaires. Les sapeurs-pompiers volontaires effectuent 67 % des interventions et 42 % des gardes nocturnes. Ils sont très présents dans les communes rurales. Dans ces petites casernes, le service s'effectue sous forme d'astreintes, diurnes et nocturnes : les pompiers interviennent quand ils sont appelés, ils se déplacent à partir de leur domicile ou de leur lieu de travail. Dans les plus grandes villes, où les pompiers volontaires travaillent main dans la main avec les pompiers professionnels, les gardes sont souvent des gardes postées : les pompiers sont dans la caserne, prêts à intervenir. L'activité des sapeurs-pompiers volontaires repose, selon la loi, sur "le volontariat et le bénévolat". Le sapeur-pompier volontaire "exerce les mêmes activités que les sapeurs-pompiers professionnels" mais l'activité "n'est pas exercée à titre professionnel". Les pompiers volontaires sont donc rémunérés par les départements sous formes d'indemnités horaires, sans cotisations sociales : 8,36 euros au plus bas de l'échelle, en intervention.

Un système fragile, du "travail au noir autorisé"

"La quasi-totalité des organisations syndicales dénonce l'utilisation abusive, massive et malsaine, des sapeurs-pompiers volontaires. On sait bien pourquoi : pour des raisons financières, explique à ASI Xavier Boy, président de la Fédération autonome des sapeurs-pompiers professionnels (FA/SPP-PATS), premier syndicat de pompiers professionnels de France. Nous sommes une profession où l'on voit arriver des gens formés de manière low cost, pour effectuer des missions de service public."  Il a déjà proposé à différents grand médias d'évoquer ces sujets. Sans retour.

Les syndicats de pompiers le disent tous : ils ne sont pas contre le volontariat, mais contre ses dérives.  "Pour notre organisation, il faut des sapeurs-pompiers volontaires, dans les petits centres, qui n'ont pas des départs tous les jours", précise à ASI Christophe Sansou, secrétaire général FO des services d'incendie et de secours. La fragilité du système français a été exposée par les mégafeux de l'été 2022. Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, demande alors aux entreprises de "libérer les sapeurs-pompiers volontaires". Cette fois-ci, les médias sont au rendez-vous pour relayer la demande ministérielle. Christophe Sansou s'insurge : "On a besoin de professionnels ! Pour offrir un service public, on est en train de précariser des volontaires, on emploie une main-d'œuvre à bas coût, sans prestations sociales." Sébastien Bouvier, à la CFDT, complète : "On est aujourd'hui 40 000 pompiers professionnels, il en faudrait 30 000 de plus… mais forcément, cela coûtera plus cher que des volontaires à dix balles de l'heure !" 

Après l'appel du ministre, les médias qui cherchent à comprendre ce qui se cache "derrière l'appel" sont si peu nombreux qu'ASI n'a pu recenser qu'un article, sur le site de France Télévisions. Pourtant, au même moment, les syndicats de pompiers professionnels communiquent et répondent au ministre. La CGT Sdis, deuxième syndicat de pompiers professionnels, publie un communiqué furieux, pointant un à-côté ubuesque de la crise : les pompiers professionnels souhaitant intervenir pour lutter contre les feux de forêts hors de leur département doivent le faire en posant des congés, et sous un statut de volontaire. Mais aucun média ne juge utile d'en parler – Mediapart avait été seul à explorer le sujet un an auparavant.

De nombreuses dérives dénoncées par les syndicats

Autre dérive dénoncée par les syndicats, le recours aux sapeurs-pompiers volontaires pour effectuer des gardes postées, programmées, de 12 h ou 24 h, au sein des casernes. Alors même que les volontaires ont souvent déjà une activité professionnelle. Beaucoup de pompiers volontaires effectuent alors des heures de travail en journée, pour leur emploi "déclaré", et enchaînent sur des nuits ou des week-ends de garde. "On exploite les sapeurs-pompiers volontaires, des personnes motivées" au détriment de leur santé et de leur capacité à intervenir lucidement dans des situations complexes, déplore Sébastien Bouvier. Des risques pourtant très peu présents dans les médias, selon notre recension. "Certains pompiers volontaires font un quasi-temps plein dans des casernes, alors qu'ils ont un travail à côté", indique bien un article solitaire d'Ouest-France dans les Côtes d'Armor en octobre 2022, et l'Humanité évoque "l'ubérisation de la sécurité civile". Un peu maigre.

Les syndicats déplorent aussi l'utilisation du statut de pompier volontaire pour assurer les saisons d'été et d'hiver dans les lieux touristiques. "Il existe une disposition pour employer les sapeurs-pompiers volontaires en tant que contractuels, mais je vous laisse imaginer ce que les Sdis préfèrent choisir, s'indigne Sébastien Bouvier. C'est inadmissible pour ces personnes qui pourraient être mieux payées, et cotiser." L'arrivée de renforts est pourtant saluée par les journalistes couvrant ces zones : "En Isère, près de cinquante sapeurs-pompiers volontaires viennent renforcer les équipes dans les casernes", titre  France Bleu, ""Un renfort indispensable pour gérer l'augmentation des interventions liée à la saison touristique", rapporte le Dauphiné Libéré. Mais au-delà d'une simple mention, ces articles ne se penchent jamais vraiment sur le statut desdits renforts.

En matière de travail dissimulé, Frédéric Greffe, un représentant syndical Sud dans la Drôme, a pointé publiquement une autre dérive : l'emploi par le Sdis d'un sapeur-pompier volontaire, pour remplacer un agent administratif en arrêt de travail. La publication syndicale, au mois de juin, n'a donné lieu à... aucun article. "J'ai renoncé à appeler les journalistes, c'est peine perdue, explique-t-il à ASI, dépité. On publie nos informations sur Facebook, les journalistes savent bien les trouver quand ça les intéresse. Ils ne veulent sans doute pas perdre leurs contacts au sein des Sdis, qui n'apprécieraient pas." Les Sdis, les employeurs des pompiers, sont en effet des sources institutionnelles précieuses qui communiquent sur les accidents, les incendies et autres interventions des pompiers, et permettent de remplir les rubriques des faits divers – du journalisme de préfecture, version pompiers.

Crise des vocations ou crise du système ? Le débat absent des médias, les syndicats aussi

Un constat semble partagé par tous, des syndicats aux pouvoirs publics : il manque des pompiers en France. Mais quels pompiers ? Pour leurs syndicats, il manque surtout des pompiers professionnels et il faut repenser le système. Pour les Sdis et le  ministère de l'Intérieur, il manque surtout des volontaires, et il faut préserver le système. Ce débat de fond vous avait échappé ? C'est normal, puisque les médias s'en tiennent quasi unanimement à la seconde solution : il manque des volontaires. Et parce qu'il y a une "crise des vocations", il faut en susciter. On cherche des solutions du côté des entreprises, il faut des gens disponibles. La presse locale relaie les demandes de recrutements ici, ,  ou encore "La crise des vocations, ce n'est pas le bon prisme", regrette pourtant auprès d'ASI le porte-parole de Sud Sdis Rémy Chabbouh. Problème : cette parole est invisible, les médias prenant la peine de contacter les représentants syndicaux à ce propos se comptant sur les doigts d'une main – citons notamment ces articles de Marianne et de France Bleu Gard Lozère

Si les délégués syndicaux sont absents ou presque des médias, les journalistes usent très largement d'une autre parole qui n'est ni celle du ministère de l'Intérieur, ni celle des Sdis. Une parole favorable au système actuel. "Il y a 191 000 sapeurs-pompiers volontaires aujourd'hui […] On souhaite porter ce chiffre à 250 000. On peut y arriver avec un plan de communication bien établi", indiquait ainsi Éric Brocardi le 11 août 2022 dans l'interview de la matinale de France Inter. Vous ne connaissez pas Éric Brocardi ? C'est le porte-parole de la Fédération nationale des sapeurs pompiers de France (FNSPF). "Il y a une crise des vocations ?", demande Nicolas Demorand. "Oui [...] On est sur une société qui est sur soi-même, on utilise beaucoup le mode selfie, on se regarde soi-même", répond le porte-parole, à l'image de la Fédé qui communique généreusement sur la nécessité de recruter 50 000 volontaires. Et les médias suivent : ici, , ,  ou 

Les médias préfèrent la Fédération nationale des sapeurs-pompiers

Pour les syndicats de pompiers professionnels, la FNSPF éclipse complètement leurs positions (contraires) auprès des journalistes en occupant l'espace médiatique de façon hégémonique. Mais qu'est-ce donc que cette fédération non-syndicale ? On vous explique. Sur son site internet, la FNSPF se présente comme "le chef d'orchestre d'un réseau associatif unique et dynamique, qui travaille au quotidien pour plus de solidarité, de reconnaissance, d'ouverture et de convivialité pour les sapeurs-pompiers"La FNSPF revendique 285 000 adhérents, dont la quasi totalité des pompiers en exercice : chaque pompier – volontaire ou professionnel – qui passe la porte d'une caserne, est "invité" à adhérer à l'amicale et à l'union départementale. Les amicales organisent des moments de convivialité, le bal des pompiers par exemple. Les unions départementales et régionales organisent des rencontres sportives et des formations. 

"L'inscription est quasiment obligatoire. Si on ne s'inscrit pas, on se met en marge du réseau", explique à ASI Frédéric Monchy, président du syndicat SNSPP-PATS. Les adhésions permettent en effet d'accéder aux œuvres des pupilles et à de nombreux avantages, des assurances négociées par exemple. Ces associations sont ensuite chapeautées par la FNSPF. "C'est ainsi que la Fédération se revendique d'une masse silencieuse, qui n'a pas idée qu'en cotisant elle finance des activités de lobbying. Dans les casernes, les sapeurs-pompiers sont à des années–lumière de comprendre ce qui se passe", poursuit Monchy. Pour les syndicats de pompiers, la FNSPF n'a donc aucune légitimité à propos des enjeux sociaux de la profession. "La fédération est composée de directeurs de Sdis, de cadres. Tout le système est tenu par elle", complète Sébastien Bouvier, à la CFDT. "La Fédération, c'est l'association la plus empoisonnante qui existe en France dans le monde professionnel, ajoute à son tour Sébastien Delavoux, secrétaire national de la CGT Sdis. Je reconnais leur utilité sociale mais je déteste leur rôle politique."

Joint par ASI, le porte-parole de la FNSPF Éric Brocardi explique qu'elle "maintient une forte place au sein de la mécanique politique et du grand public" (on avait remarqué, ndlr). Contrairement aux organisations syndicales, lui estime que la fédération a toute sa place dans les médias pour "défendre les sapeurs-pompiers, apporter une expertise, sur les sujets sociaux, politiques". Et puis, certains sujets sont partagés avec les syndicats : "Il m'est arrivé de dire sur les plateaux que l'on manque de moyens." Son analyse ? "Dans les médias, la parole est offerte à tout le monde", poursuit Éric Brocardi en affirmant qu'il "renvoie vers les syndicats, au sujet des grèves par exemple". Pourquoi est-il néanmoins infiniment plus présent à la télévision que les syndicats ? "C'est d'une part, parce que je suis à Paris, et d'autre part, parce que nous traitons des sujets dans leur globalité."

La CGT Sdis, par la voix de Sébastien Delavoux, a aussi sa petite idée quant à la raison du désintérêt médiatique pour le système de sécurité civile. "C'est trop complexe, personne n'y comprend rien, comment c'est structuré. Les pompiers eux-mêmes ont du mal à s'y retrouver. Les médias vont au plus simple, ils appellent la Fédération, qui va sur les plateaux pour servir son discours rassurant, pour vanter le modèle français du volontariat." Il constate aussi : "Les pompiers ne veulent pas nuire à l'image d'Épinal, ils ne veulent pas témoigner. Et les gens ne veulent pas se griller auprès des hiérarchies."

C'est qui le patron ?

Auprès du grand public et des journalistes, la Fédération cultive aussi une certaine ambiguïté par rapport à son rôle, et à ce qu'elle représente (ou pas). Sur les réseaux sociaux, son porte-parole Éric Brocardi se présente ainsi comme "porte-parole des sapeurs-pompiers de France". Et c'est repris sans distance par les médias : ici,  et . Pour le principal intéressé, "il s'agit d'un raccourci utilisé par les médias". On lui fait remarquer qu'on ne l'a pas beaucoup vu contester l'appellation dans ses interviews. Et qu'elle figure aussi telle quelle dans la bio de son compte Twitter. "Sur Twitter, il n'y a pas assez d'espace pour préciser", ajoute-t-il alors. Plusieurs syndicats déplorent aussi que le ministère de l'Intérieur laisse souvent la FNSPS communiquer à propos de telle ou telle intervention, à la place de la Direction générale de la Sécurité civile dont c'est le rôle.

Les médias vont même jusqu'à employer le qualificatif trompeur de "patron des pompiers" pour nommer le président de la FNSPF de 2018 à 2023, Grégory Allione, par exemple chez Libération et au Parisien. Ou quand à l'antenne de RMC face à Apolline de Malherbe, le fameux "patron" recrute des volontaires : une opération de communication pour laquelle la FNSPF a sollicité "l'expertise du célèbre publicitaire Jacques Séguéla", et obtenu la participation de "stars" pour sa campagne. Dont la journaliste… Apolline de Malherbe, qui invite très régulièrement la FNSPF à s'exprimer : , , , et . Elle présente toujours, bien sûr, le président de la Fédération comme "le patron".

Jean-Paul Bosland est le nouveau "patron des pompiers" depuis le mois de janvier. Au moment de sa nomination, sur les bases d'une dépêche AFP, les articles de presse du Figaro, de Sud-Ouest ou dans la Croix mettent en avant son statut de pompier volontaire. Mais aucun ne mentionne qu'il est conseiller régional LR en Auvergne-Rhône-Alpes. Un détail, sans doute. "On a été surpris de voir ce nom sortir du chapeau,  Non pas parce que c'est un sapeur-pompier volontaire, mais parce qu'il a un mandat politique, dénonce Frédéric Monchy, président du syndicat SNSPP-PATS. Aujourd'hui, on ne peut plus considérer que la FNSPF n'a pas d'orientation politique." Sollicité par ASI Jean-Paul Bosland n'a pas répondu.

Le pompier Matzak, star des syndicats, inconnu des médias

Revenons au statut social des pompiers volontaires. En 2018, un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a suscité un grand enthousiasme chez les syndicats de sapeurs-pompiers professionnels français. L'arrêt Matzak, du nom d'un pompier belge, reconnaît en effet le statut de travailleur à un volontaire. En novembre 2019, le déclenchement de procédures en France engendre une dépêche AFP – republiée ici,  ou . Mais pour le débat, on attendra : un seul récit médiatique surnage… celui de la FNSPF. Dans un article garanti sans parole syndicale des Échos (ou dans la Nouvelle République), la fédération affirme que "le scénario d'un changement de statut des pompiers volontaires serait un véritable cataclysme". Elle souhaite plutôt que "le gouvernement français saisisse l'Union européenne pour qu'une nouvelle directive spécifique soit publiée", pour que la France puisse conserver tel quel le statut des volontaires. 

C'était pourtant pour les syndicats "une immense victoire" contre l'iniquité qu'ils dénoncent dans le vide – l'Humanité fait partie des rares exceptions. Pourtant, ce n'est pas comme si les syndicats avaient tu leur point de vue quant à l'arrêt Matzak. "Toutes les conditions sont réunies pour que les sapeurs-pompiers volontaires français aient le statut de travailleur […], obligeant les Sdis à respecter des temps de repos pour les pompiers volontaires. Il en va de la santé et la sécurité des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels", et donc, "de la sécurité collective", écrivait ainsi Sud.

Les actualités plus récentes ne manquent pas non plus à propos du statut des volontaires. En mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg condamne le Sdis de Moselle à encadrer les heures de garde des pompiers volontaires, en s'appuyant sur la fameuse jurisprudence européenne. Le Sdis de Moselle faisait en effet travailler des sapeurs–pompiers volontaires jusqu'à près d'un équivalent temps plein, souvent en plus d'un emploi principal. La CFDT demandait, et a obtenu, qu'une limite soit fixée. La nouvelle et ses répercussions, d'ampleur nationale, n'ont pourtant été relayées que par de rares titres de presse régionale et quelques médias spécialisés. 

Les syndicats saluent la décision des juges, estimant qu'elle protège les pompiers volontaires ? La FNSPF, encore elle, se joint à l'Association des Sdis de France pour dénoncer la décision du tribunal administratif dans un communiqué titré "Non : le volontariat de sapeur-pompier n'est pas un travail". Son texte est d'une teneur similaire à celui du communiqué de l'Association des Départements de France (qui financent les Sdis). Les syndicats répliquent, FO dénonçant ainsi "des communiqués lunaires". Mais le débat n'intéresse toujours pas les grands médias.

Un autre sujet oppose les syndicats et la FNSPF. Les sapeurs–pompiers volontaires peuvent actuellement travailler jusqu'à 60 ans, et 65 ans sur dérogation. Les professionnels voient leur âge de départ prolongé à 59 ans. Que propose la Fédération ? Que les volontaires travaillent jusqu'à… 67 ans, selon un courrier envoyé le 2 mai 2023 au Directeur général de la sécurité civile, qu'ASI dévoile en exclusivité – s'il fallait un témoin supplémentaire du désintérêt journalistique, précisément zéro média ayant fait part de cette information. Pour le porte–parole de la FNSPF Éric Brocardi, la proposition est logique : "On ne peut pas demander d'arrêter à des gens qui sont aptes, qui ont encore la foi et qui veulent continuer", argue-t-il auprès d'ASI"Faire monter des pompiers à l'échelle jusqu'à 67 ans ! C'est le baiser du cobra", s'exclame Rémy Chabbouh, du syndicat Sud. 

L'IGA missionnée par Darmanin autour du statut, silence radio des médias

En mars 2023, Gérald Darmanin a missionné l'Inspection générale de l'administration (IGA) au sujet de "l'évolution du cadre d'exercice de l'activité de sapeur-pompier volontaire". Une mission dont les médias ont été tenus à distance… sans avoir beaucoup cherché à fouiner : dans un document obtenu par ASI, que nous révélons – encore une fois –, l'objectif est pourtant ni plus ni moins de "sécuriser notre modèle de volontariat au regard du droit de l'Union européenne", indique le ministre de l'Intérieur. 

Reçus par l'IGA, les syndicats ont demandé, une fois de plus, la reconnaissance du statut de travailleur des sapeurs-pompiers volontaires, pour entre autres encadrer les horaires de travail et limiter les dérives. "Il va vraiment falloir faire quelque chose, conclut Sébastien Delavoux, à la CGT. Parce que des pompiers payés huit euros l'heure, sans cotisations sociales, à qui on demande d'être disponibles 24 h sur 24 et de s'exposer à des risques de cancer… ça commence à faire beaucoup ! La sécurité civile, c'est l'affaire de tous. À quand le débat public ?"  Aucun média ne les a appelés suite à leurs auditions, pour changer. Les pompiers vont représenter, plus que jamais, une profession hyper-médiatisée à l'heure du dérèglement climatique. Il serait peut-être temps que les journalistes assument leurs responsabilités et relaient enfin des informations autour de ce débat aussi sensible qu'important, plutôt que de se contenter de louer la figure du héros et de ses exploits. 


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